MARC RENAUD   p h o t o g r a p h e
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Rodin (1999)

Un musée est souvent plus qu'un simple lieu d'exposition où les oeuvres présentes prennent la poussière.
Le musée Rodin -installé dans un des anciens ateliers du sculpteur -regroupe plusieurs secteurs d'activités dont les salles d'exposition sont la partie visible.
Plus de quarante personnes y travaillent à garder vivante l'oeuvre de Rodin: un service culturel, un atelier de restauration, la gestion commerciale de l'oeuvre de Rodin (fontes posthumes), un service d'iconographie,...
Mais le musée Rodin est également un lieu chargé d'une histoire mouvementée, il fut tour à tour couvent, "squat" ou ateliers occupés par des artistes avant de devenir musée.

Hôtel Biron

Le musée Rodin, ouvert depuis 1919, est installé dans un ancien hôtel particulier du 18 èmècle qui doit son nom au duc de Biron, maréchal de Louis xv et qui est devenu en 1804 un pensionnat de Jeunes filles géré par les dames de la société du Sacré-Coeur de Jésus.
Les lois de séparation des Eglises et de l'état et leur conséquence, l'expulsion des religieuses, ont pour résultat la location précaire, par le liquidateur, des biens de la congrégation ainsi que certains logements.
Dès la début du siècle de nombreux artistes habitent ou travaillent dans cette demeure; on peut citer Cocteau, Matisse, la danseuse Isadora ou le poète Rainer Maria Rilke.
Ce dernier fut le secrétaire particulier de Rodin de 1905 à 1906 et depuis, malgré quelques brouilles, une forte amitié lie les deux hommes.
En lui vantant la beauté de la demeure et de son jardin, Rilke incite Rodin à s'y installer.
Séduit par les lieux, Rodin y emménage en 1908 sa collection antique puis certaines de ces sculptures monumentales dont l'homme qui marche ou Jean d'Aire.
En 1911 le domaine est racheté par l'état, Rodin propose de leur donner la totalité de ses collections, de les installer à l'hôtel Biron, afin de le transformer en musée Rodin.
Le projet se heurte à l'opposition des milieux culturels conservateurs, à la réprobation des catholiques indignés de la présence d'oeuvre à leurs yeux sacrilèges, dans un ancien couvent, et aussi à l'hésitation de l'état, réticent devant l'attribution définitive de ce lieu à un artiste vivant et si contesté.
Après de longs débats parlementaire, la proposition du sculpteur est acceptée et 3 donations successives en 1916 donneront à l'état tout les oeuvres d'art de Rodin (6000 plâtres, 7800 dessins), sa collection antique (7000 pièces) et l'ensemble des documents de tout nature (des lettres d'amour à ses factures) rassemblés au cours de sa vie.

L'année suivante Rodin décède sans avoir vu l'ouverture de ce musée tant désiré.

Ouvert depuis 1919, 500000 visiteurs actuellement franchissent chaque année les portes du musée et y découvrent dans un cadre somptueux l'oeuvre d'un des sculpteurs les plus innovateurs de débuts du 20 siècle.

Une maternelle chez Rodin

"Et là, que voyez-vous ?"
"C'est une très grosse porte !"
"Mais qu'est qu'il y a sur cette porte ?"
"Ben il y a des gens qui s'embrassent" répond Nicolas
"Mais là-haut c'est des morts" observe Justine
"Moi je crois que c'est un immense tremblement de terre, il y a des gens qui tombent là-bas" dit un autre
"Eh vous avez vu il y a des bébés !" s'exclame son camarade

Nous sommes dans les jardins du musée Rodin avec une classe de maternelle.
La visite touche à sa fin et les enfants découvrent la porte de l'Enfer.
Cette oeuvre occupa Rodin durant plusieurs décennies, il la remanie sans cesse ; y ajoute des figures, en déplace certaines ou en brise d'autres pour en utiliser les fragments.

La porte de l'Enfer est l'oeuvre d'une vie, de la vie; sculpture formé de centaines d'autres que Rodin laissera inachevé à sa mort.
Les enfants, tantôt sur la pointe des pieds tantôt à quatre pattes, découvrent un enchevêtrement de corps et de fragments ; une oeuvre d'où la vie jaillit de la matière pour se réaliser en sculptures.

Lors de la visite, ils ont appris ce qu'était un buste ; la différence entre un plâtre, un marbre et de la terre cuite.
Ils ont dessiné l'âge d'Airain, observé l'homme au nez cassé et découvert l'histoire du couple illégitime de Paola et Franceska (le Baiser).
Cette visite est animée par le service culturel du musée.
Ce service, très dynamique, organise de nombreuses visites guidées, ainsi que des conférences autour d'une sculpture ou d'un thème plus général.
Des classes défilent mais également des groupes de malvoyants

Visite tactile

Face au bronze de Jean d'Aire, Pierre effleure de ses mains la tête de la sculpture.
Délicatement ses doigts glissent le long du corps sculpté, palpent les formes, estiment les volumes.
"C'est l'âme, le sentiment, l'idée qui expriment les traits d'un visage" disait Rodin.
Les doigts, plongés dans les concavités de la matière, se laissent surprendre par les formes expressifs (les bras tendus en avant et fermés en poings montrent la détermination de Jean d'Aire face à son destin cruel, sa têtès musclée et compacte reflètent l'angoisse et l'impuissance de l'homme à l'approche de la mort).
Jean d'Aire est une des 6 figures des Bourgeois de Calais : oeuvre de commande représentant le geste héroïque de quelques notables prêts à se sacrifier pour la libération de leur ville assiégée par les anglais.
Plusieurs mains sont maintenant sur la sculpture et les commentaires vont bon train :
"On dirait que ces deux jambes sont en marche mais les deux pieds sont à la même hauteur" ou "Il se penche en avant mais semble retenu par une force intérieur"
Cette visite fait partie d'un atelier où les participants - après la visite tactile -réaliseront un buste puis une sculpture inspirée des Bourgeois de Calais.
Comme pour les Bourgeois les sculptures individuelles seront assemblées pour donner une oeuvre commune sur le thème de l'handicap.
Leurs sculptures représentent rarement un handicap de vision mais elles montrent plutôt une difficulté de leur sujet à s'éveiller au monde; les hommes et femmes représentes sont souvent recroquevillés sûr eux-mêmes.
Assemblées par l'animateur, les sculptures formeront un groupe d'individus en prise avec leur handicap.

Ce sera le terme du stage, les participants auront découvert au touché l'oeuvre de Rodin, travaillés la terre et exprimés ensemble un thème qui les touche- bien évidemment de près.

 

 

 
 
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